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Un marché en recomposition : Sony, Nintendo, Microsoft

Quand Microsoft lance la Xbox Series XS en 2020, l’ambition est limpide : s’imposer comme un pilier du marché grâce à une puissance brute, une architecture PC-friendly, et une intégration totale du Game Pass. Mais cinq ans plus tard, le constat est sévère : la Series a perdu la guerre du hardware.

Les chiffres de vente sont parlants :
• Xbox Series XS : environ 30 millions d’unités vendues depuis 2020.
• PS5 : plus de 65 millions.
• Switch 1 : toujours au-dessus des 130 millions, malgré son âge.
La Series S, censée démocratiser la génération grâce à son prix attractif, s’est transformée en frein structurel : moins performante, elle limite le développement des jeux “cross-gen” et complique le maintien d’une vraie parité avec la Series X. Résultat : les studios pestent, les joueurs hésitent, et les portages souffrent.
Même le Game Pass, pourtant la carte maîtresse de Microsoft, peine à compenser. Le catalogue est riche, mais la promesse d’un “day one premium permanent” a perdu en crédibilité :
• Des exclusivités repoussées (Fable, Perfect Dark, Avowed).
• Des annulations discrètes.
• Une communication floue sur les dates et les formats.
L’acquisition géante d’Activision-Blizzard a certes enrichi l’offre (Call of Duty, Diablo, Crash Bandicoot), mais sans créer l’effet “wow” attendu sur les ventes de consoles. Le public PC reste fidèle, mais le hardware Xbox ne convertit plus.
Aujourd’hui, Microsoft ne quitte pas le marché — mais son rôle a changé. La Xbox devient la vitrine physique d’un écosystème cloud, centré sur l’abonnement. Le “hardware war” est perdu, et Microsoft mise désormais sur une stratégie transversale, à long terme, où la console n’est qu’un terminal parmi d’autres.

Nintendo : le challenger inattendu

Là où beaucoup imaginaient une domination Sony/Microsoft à deux têtes, Nintendo s’est repositionné comme acteur central. La Switch 1 avait déjà rebattu les cartes : avec plus de 130 millions de machines vendues, elle est devenue la console la plus populaire de son époque. Mais c’est avec la Switch 2 que le véritable changement de paradigme s’opère.

Dès le lancement, Nintendo aligne des AAA modernes en version native :

• Cyberpunk 2077 Ultimate Edition

• Street Fighter 6

• Star Wars Outlaws

Pas de cloud, pas de downgrade extrême, pas de retard. Ces titres tournent sur Switch 2 avec des performances solides, portés par le duo DLSS + RE Engine, et validés par les premiers tests techniques. Et avec l’arrivée simultanée de Resident Evil Requiem en février 2026, la Switch 2 entre officiellement dans la cour des grands.

Ce basculement est stratégique. Nintendo n’est plus seulement “le constructeur des Mario et Zelda”. Il devient un challenger frontal de Sony sur le terrain des blockbusters, tout en conservant son écosystème unique de licences internes et son image familiale. C’est ce double visage — console des classiques + machine capable de faire tourner les mastodontes modernes — qui fait de la Switch 2 un acteur incontournable du cycle actuel.

Et surtout, Nintendo réussit là où Microsoft échoue : il vend du hardware, il séduit les éditeurs tiers, et il convertit un public hybride — à la fois familial et gamer.


Sony : la stratégie premium consolidée

De son côté, Sony garde une position de leader. La PS5 reste la console la plus vendue du cycle, avec une image solidement installée : celle de la machine premium pour les expériences solo haut de gamme.

Des titres comme God of War Ragnarök, Spider-Man 2, ou Death Stranding 2 continuent d’ancrer la marque PlayStation comme synonyme de prestige narratif et technique. L’écosystème PlayStation mise sur la fidélité :

• Le PS Plus évolue doucement, mais reste moins disruptif que le Game Pass.

• Sony défend son modèle classique : vendre des consoles, des exclusivités fortes, et miser sur des sorties “événement”.

Mais face à la Switch 2, la différence se réduit. Si Nintendo prouve que son hardware peut accueillir les mêmes AAA, la barrière entre “console principale” (PS5) et “console secondaire” (Nintendo) pourrait disparaître pour une partie des joueurs. Et c’est précisément ce qui inquiète Sony : perdre le monopole de l’expérience blockbuster.


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Le PC : l’acteur silencieux

Dans ce triangle, il ne faut pas oublier le PC, qui reste le maître de la flexibilité :

• Plateforme ouverte.

• Compatible avec tous les services (Steam, Epic, Game Pass).

• Capable d’accueillir tous les AAA, souvent en version supérieure.

Mais le PC n’est pas un constructeur. Il ne vend pas de consoles. Il ne dicte pas les calendriers. Il absorbe, il accompagne, mais il ne structure pas le marché comme le font Sony, Nintendo ou Microsoft.

Et c’est là que la Switch 2 devient intéressante : elle propose une expérience hybride, proche du PC en nomade, mais avec une logique de console. Elle comble un vide que ni Sony ni Microsoft n’ont su occuper.


Un duel qui redéfinit le cycle

Ce repositionnement a des conséquences majeures :

• Si la Switch 2 s’impose comme console “AAA-friendly”, Nintendo pourrait capturer une partie du public PlayStation, notamment les joueurs nomades ou hybrides.

• Si Sony ne parvient pas à se différencier face à un Nintendo qui aligne les mêmes titres, la compétition pourrait tourner à un affrontement culturel : exclusivités narratives PlayStation vs héritage ludique Nintendo.

• Microsoft, enfin, risque de devenir spectateur. Son avenir repose moins sur la guerre des consoles que sur la capacité à imposer le Game Pass comme abonnement incontournable — un pari difficile, mais pas impossible si l’écosystème PC et mobile prend le relais.