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1. Trente ans d'expansion : de la conquête à la saturation

Les années 1990 et 2000 ont été marquées par une expansion continue du marché console. Chaque transition générationnelle ne se contentait pas d'apporter un bond technique : elle ouvrait la porte à de nouvelles catégories de joueurs.

La PlayStation a fait entrer le jeu vidéo dans les salons adultes avec une image plus grand public. La PlayStation 2, console la plus vendue de l'histoire, s'est imposée grâce à son lecteur DVD intégré et à une offre de jeux d'une variété inédite. La Wii a bouleversé la donne en attirant un public familial jusque-là éloigné du média.

Cette période se caractérisait par une équation simple : nouvelles machines égalaient nouveaux publics, qui égalaient volumes croissants. Le marché découvrait des continents vierges.

La mutation des écosystèmes numériques (2005-2015)

L'arrivée du haut débit et des boutiques en ligne a transformé le modèle économique. À partir de la génération Xbox 360/PS3, les constructeurs ont construit de véritables écosystèmes fermés où chaque transaction passe par leur plateforme. Les consoles sont devenues des hubs de distribution autant que des machines de jeu.

Ce modèle a apporté stabilité et revenus récurrents, mais il a aussi modifié les métriques du succès. Le nombre de machines vendues cède progressivement la place à l'engagement dans l'écosystème : abonnés aux services, joueurs actifs sur les titres en ligne, consommateurs de contenus additionnels.

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Les premiers signes de plafonnement (2020-2025)

La génération actuelle affiche encore des volumes impressionnants, mais les signes de saturation se multiplient. Sony a abaissé sa prévision de ventes PS5 pour l'exercice clos en mars 2024 de 25 à 21 millions d'unités, en évoquant un déclin graduel des volumes pour l'exercice suivant. Nintendo a réduit ses objectifs de ventes Switch à 11 millions pour l'exercice 2024-2025, en attendant sa remplaçante.

Ces ajustements ne signalent pas un échec, mais une normalisation. Le public historique vieillit, les jeunes adultes dépensent moins dans le jeu premium traditionnel, et les ventes de consoles se tassent plus rapidement après l'euphorie du lancement. La croissance naturelle par conquête de nouveaux foyers ne suffit plus.

Le défi de la valorisation

Dans ce contexte, la question centrale devient : comment maintenir des bilans financiers en progression quand la base n'évolue plus aussi vite ? La réponse de l'industrie est claire : en augmentant la valeur extraite de chaque joueur. Cela passe par la hausse progressive des prix des jeux AAA, la multiplication des éditions premium, la généralisation des DLC, des microtransactions, des battle pass et des services par abonnement.

Cette mutation soulève des interrogations : jusqu'où les joueurs accepteront-ils de payer pour rester dans la course ? Les contenus additionnels diluent-ils la notion même de jeu complet ? Les modèles par abonnement vont-ils redéfinir la façon de consommer le jeu sur console ?