Une taverne, des promesses
Premiers pas – La guilde des taverniers vous attend
Tout commence dans la petite bourgade de Riverbottom, où le joueur hérite d’un établissement modeste. L’arrivée de Dorothée, représentante de la guilde des taverniers, donne le ton : pour espérer faire carrière, il faudra prouver sa valeur à travers une série d’épreuves. Ce tutoriel déguisé introduit les bases du gameplay : aménagement du bar, gestion du personnel, premiers services, et surtout, compréhension des attentes des clients.
Ces derniers évaluent la taverne selon trois critères : boissons, service et cuisine. Chacun est représenté par un petit drapeau coloré au-dessus de leur tête. En survolant ces icônes, on obtient des indications précieuses sur les points à améliorer. Ce système de notation, simple en apparence, devient rapidement le cœur de la progression : chaque étoile gagnée débloque de nouvelles fonctionnalités, pièces ou équipements.
La mécanique des étoiles – Progression et déblocages
Tavern Keeper repose sur un système d’étoiles qui structure la montée en puissance de chaque établissement. Pour décrocher la première étoile, il faut maximiser les trois jauges de satisfaction client. Cela implique d’optimiser l’offre de boissons, de former un personnel efficace et de proposer une cuisine adaptée aux goûts de la clientèle.
Chaque étoile franchie débloque de nouveaux éléments :
➤ 1 étoile : accès à la cuisine, aux toilettes, et à des meubles fonctionnels comme le four ou la marmite.
➤ 1,5 étoile : ouverture de chambres pour le personnel, bureau d’accueil.
➤ 2 étoiles : installation de scènes pour accueillir des artistes et proposer des animations.
Le tableau d’attraction des clients, accessible après quelques jours d’activité, devient alors un outil stratégique. Contre quelques pièces, il permet d’anticiper le nombre de visiteurs par tranche horaire, leur type (elfes, orcs, humains…) et leurs préférences. Mieux encore, il révèle les groupes de clients aux demandes spécifiques : certains exigeront des plats chauds, d’autres des divertissements ou des journaux. À vous d’adapter votre offre pour maximiser la satisfaction — et les pourboires.
Ce système de progression est remarquablement bien pensé. Il pousse à l’optimisation sans jamais brider la créativité. Chaque palier franchi donne un sentiment tangible d’évolution, renforcé par les transformations visibles de la taverne.
La vie dans la taverne – Gestion, crises et ambiance
Derrière les comptoirs et les tireuses à bière, Tavern Keeper déploie une gestion du personnel étonnamment fine. Chaque employé peut être assigné à un rôle spécifique — serveur, cuisinier, homme d’entretien, ou dogsbody polyvalent — à condition de disposer d’un uniforme et d’un casier. Le joueur peut définir leurs horaires via un planning mural, et même constituer des équipes de jour et de nuit. Une nécessité, tant les besoins varient selon les heures et les pics d’affluence.
Mais recruter ne suffit pas : il faut aussi gérer les humeurs. Chaque employé possède des traits de caractère (jusqu’à six), qui influencent ses réactions. Un serveur “sensible” pourra paniquer en cas de bagarre, un autre “gourmand” videra les réserves s’il est contrarié. Le bonheur des employés baisse naturellement avec le temps, et un salarié malheureux peut littéralement exploser : bagarres, sabotage, destruction de mobilier… Pour éviter cela, il faut leur accorder des bonus, aménager des chambres confortables, ou limiter les tâches qu’ils détestent.
Cette gestion humaine, parfois chaotique, donne lieu à des scènes aussi cocasses que désastreuses. Lors du festival des vendanges, un employé mécontent a déclenché une bagarre en pleine heure de pointe, ruinant la réputation de l’établissement et brisant deux tireuses flambant neuves. Une leçon apprise à la dure : dans Tavern Keeper, le personnel n’est pas une ressource, c’est un écosystème.
Cuisine et boissons – Une carte à composer
La cuisine, débloquée après la première étoile, ouvre un pan entier du gameplay. Le joueur peut y installer un grill, une marmite, un four à pain, puis plus tard un tournebroche. Chaque station permet de préparer des plats selon des recettes que l’on compose soi-même, en combinant des ingrédients issus de la réserve. Trois catégories sont disponibles au départ (soupes, ragoûts, grillades), d’autres s’ajoutent avec la progression.
La création de recettes est un petit jeu d’équilibriste. Chaque ingrédient modifie le profil de saveur du plat (sucré, salé, grossier, raffiné…), et donc son attrait pour les différentes races de clients. Les orcs raffolent des plats “gross” et “tough”, les elfes préfèrent le “sweet” et le “pure”. Un simple changement d’ordre dans les ingrédients peut faire basculer l’intérêt d’un groupe : ajouter une carotte en troisième position fait fuir les orcs, mais en quatrième, tout le monde reste satisfait. Ce système pousse à expérimenter, à affiner sa carte, et à adapter l’offre à la clientèle prévue.
Les boissons, plus simples à gérer, n’en sont pas moins stratégiques. Chaque tireuse permet de proposer une boisson différente, et certaines races ont leurs préférences. Il faut aussi surveiller les stocks : les fournisseurs peuvent être en rupture, obligeant à revoir la carte. Lors d’une pénurie de poulet fermier, il a fallu improviser avec du coquelet, au risque de décevoir les habitués.
Narration émergente – Le livre de contes et les arcs scénarisés
Là où Tavern Keeper surprend, c’est dans sa capacité à générer de la narration à partir de ses systèmes. Le livre de contes, qui surgit aléatoirement au-dessus de certains clients, déclenche des événements interactifs. Le joueur engage une conversation, choisit des réponses, et parfois, un mini-jeu s’enclenche : une roue de fortune où il faut stopper le curseur sur une zone verte pour réussir un test de charme, de force ou de persuasion.
Ces séquences, souvent drôles, parfois touchantes, enrichissent l’univers. Un client surpris en train de mettre le feu au mobilier se révèle être un incompris, persuadé de rendre service. En réussissant les bons tests, on découvre son histoire, on évite la catastrophe, et on gagne un allié. Ces moments ne sont pas anecdotiques : ils influencent la réputation, les votes lors d’événements, et parfois même les mécaniques de jeu.
Le festival des vendanges, point culminant du scénario de Halflington, en est un parfait exemple. Quatre guildes s’affrontent — voleurs, brasseurs, philosophes, taverniers — et chacune tente de saboter les autres. Les brasseurs proposent un breuvage invisible aux “cœurs impurs”, les philosophes remettent en cause la distance entre l’urne et les votants… À chaque jour son attaque, à chaque joueur sa riposte. Ces arcs scénarisés donnent un rythme, une tension, et un humour qui rappellent les meilleurs moments de Two Point Hospital, tout en restant uniques.
Tavern Keeper propose actuellement trois scénarios jouables, chacun avec son ambiance, ses contraintes et ses arcs narratifs.
Riverbottom sert de tutoriel narratif. On y découvre les bases de la gestion, les interactions avec la guilde, et les premières mécaniques de service. C’est une mise en bouche efficace, qui introduit les systèmes sans les brusquer.
Halflington, plus chic et elfique, pousse à la personnalisation et à la stratégie. Dès l’arrivée, on découvre des lits brûlés dans la salle du personnel — un détail qui prendra sens plus tard. Le scénario introduit le tableau d’attraction des clients, les scènes d’artistes, et surtout le festival des vendanges, un concours entre guildes où chaque jour apporte son lot de coups bas et de rebondissements. C’est ici que le jeu révèle sa capacité à mêler gestion et narration avec brio.
Gugamush, plus austère, propose un démarrage sans budget. Le joueur hérite d’un bar fermé depuis dix ans, avec un orc de ménage à payer rétroactivement. Le scénario introduit un arc scientifique délirant : un chercheur vous livre des tonneaux expérimentaux à tester sur les clients, promettant de l’or à la clé. C’est un défi de survie, où chaque pièce compte, et où l’improvisation devient une nécessité.
Chaque scénario renouvelle les mécaniques, les enjeux et le ton. On passe d’un apprentissage guidé à une compétition féroce, puis à une gestion de crise. Cette variété donne au jeu une rejouabilité immédiate, renforcée par les déblocages croisés entre scénarios.
Technique et jouabilité – Une taverne bien optimisée
Sur PC, Tavern Keeper tourne sans accroc. Testé sur une configuration RTX 3050 couplée à un Ryzen 7 série 4000, le jeu affiche une fluidité constante, même lors des pics d’activité. Après de longues sessions, quelques relances peuvent s’avérer utiles, notamment en cas d’enregistrement actif en arrière-plan, mais rien qui nuise à l’expérience globale.
Sur Steam Deck, le jeu surprend par sa stabilité. En 800p à 90 Hz, le GPU est sollicité, mais le framerate reste supérieur à 30 FPS dans la majorité des situations. L’interface, dense en informations, demeure lisible sur l’écran portable. Une recommandation utile pour les joueurs mobiles : mapper la rotation de caméra sur les boutons L4/R4 pour fluidifier la navigation. Le jeu est pleinement jouable en nomade, ce qui n’est pas anodin pour un titre de gestion aussi riche.
Côté pathfinding, rien à signaler : en vingt heures de jeu, seuls trois blocages ont été observés, tous corrigés via une fonction intégrée. L’IA des employés, bien que perfectible dans certaines situations, reste globalement fiable.
Enfin, l’interface, bien que chargée, s’organise de manière logique. Le guide intégré, qui récapitule l’ensemble des tutoriels, facilite grandement la prise en main. On apprend vite, et on prend plaisir à maîtriser les systèmes, sans jamais se sentir perdu.
Points forts
➤ Richesse mécanique dès l’accès anticipé
➤ Narration émergente et arcs scénarisés
➤ Création de recettes fine et stratégique
➤ Gestion du personnel vivante et imprévisible
➤ Variété des scénarios et rejouabilité
Points faibles
➤ Équilibrage parfois punitif
➤ Contenu encore partiel
➤ Quelques bugs et soucis d’IA
➤ Interface perfectible sur certains points
Verdict
Tavern Keeper est un jeu de gestion narratif ambitieux, déjà étonnamment dense malgré son accès anticipé. Il mêle humour, stratégie et storytelling avec une personnalité unique. Si vous aimez les jeux où chaque décision compte, où les clients ont une histoire, et où l’imprévu est roi, cette taverne mérite votre visite. Et elle ne fait que commencer à se remplir.
La note attribuée à ce stade reflète l’état actuel de l’accès anticipé. Elle évoluera lors de notre test final, une fois les six scénarios disponibles, la dernière taverne débloquée, et le mode jeu libre pleinement exploré. Un focus complet sur les outils de création viendra également enrichir notre analyse.