Un barbier-chirurgien face aux ténèbres
Encore un jeu de cartes ? C’est ce qu’on se dit en lançant la démo de BLOODLETTER. Mais à peine quelques minutes plus tard, les doutes s’effacent : le titre du studio berlinois Aldamami Games installe une ambiance unique, quelque part entre la superstition médiévale et la stratégie moderne façon roguelike. Ici, pas question d’incarner un guerrier ou un mage : on joue un barbier-chirurgien, soignant les maux physiques et spirituels de villageois hantés par une entité malfaisante.
L’habillage visuel – entre enluminures gothiques et tarot ésotérique – pose le décor. Quelques phrases suffisent à situer le contexte : les jours passent, les patients défilent, et la menace invisible ronge lentement la communauté.
Un gameplay qui soigne plus qu’il ne combat
La boucle est simple et efficace. Chaque journée, cinq villageois se présentent au cabinet. Ils ont deux jauges : santé et pureté.
➤ On joue jusqu’à 3 cartes pour les soigner (2 seulement si le patient est “méfiant”).
➤ Les cartes peuvent restaurer la santé, purifier l’esprit, enlever des maladies ou redonner confiance.
➤ Certaines combinent plusieurs effets : sacrifier de la santé pour gagner de la pureté, offrir un bonus supplémentaire à un patient confiant, etc.
À la fin de la journée, on rend visite à un habitant du village pour améliorer son deck : cloner une carte, la booster, en échanger une, ou décider des patients du lendemain. La nuit, l’entité frappe tous les villageois, retirant points de santé et de pureté, ou en infligeant de nouvelles maladies.
L’objectif : atteindre 300 puis 600 points de pureté cumulés dans le village. Chaque palier arrache un fragment d’hématite à l’entité, jusqu’à sa défaite.
Entre choix stratégiques et dilemmes éthiques
Le cœur de BLOODLETTER repose sur une série de dilemmes permanents : faut-il soigner un patient fragile au risque de laisser passer un autre couvert de maladies, ralentir la progression de pureté pour préserver la santé générale du village, ou encore accepter de polluer son deck avec une carte malédiction — vouée à disparaître une fois jouée — afin de sauver la communauté ? La première entité de la démo demande environ quarante minutes à vaincre, juste assez pour s’imprégner du cycle jour/soir/nuit. On se surprend alors à vouloir relancer immédiatement une partie, optimiser son deck et tester une nouvelle approche : le fameux effet “one more run” cher aux roguelike.
Graphiquement, le titre assume un style médiéval-fantastique stylisé, avec des personnages qui semblent sortis d’un livre de médecine antique. Les entités, muettes et oppressantes, sont réduites à des illustrations inquiétantes. Côté son, petites musiques de taverne et clavecin médiéval accentuent l’ambiance, soutenues par des bruitages simples mais efficaces. L’interface est claire, fluide, sans accroc technique dans la démo.
Rejouabilité et perspectives
La démo de BLOODLETTER ne laisse entrevoir qu’une partie de son potentiel, mais elle montre déjà des bases solides. On y affronte d’abord une première entité, et sa défaite récompense le joueur d’une métahématite qui permet de débloquer le niveau de difficulté facile de la seconde. Le contenu final promet d’aller bien plus loin avec quatre entités au total, chacune déclinée en trois niveaux de difficulté, plus de quatre-vingts cartes mêlant bénédictions, malédictions et effets combinés, ainsi qu’une galerie d’une dizaine de villageois aux professions marquées – du boucher à la couturière en passant par la meunière – qui influencent directement le déroulé des parties. Si Aldamami Games tient ses promesses pour la sortie prévue en 2026, le jeu pourrait bien s’imposer comme une pépite indé dans la lignée de Balatro : facile à comprendre, long à maîtriser, et diablement addictif.
Verdict Preview
BLOODLETTER transforme le deck-building en un rituel étrange, où l’on soigne plus qu’on ne frappe, où la survie du village passe par la gestion fine d’un paquet de cartes. Sceptique au départ, on se retrouve happé par son ambiance unique et sa boucle stratégique redoutablement bien pensée. S’il tient ses promesses de variété et de profondeur, le jeu pourrait bien devenir l’un des indés marquants de 2026.